Niveau supérieur Suite Retour
Sommaire Histoire Grecque Antique
Zeus
Athéna
Apollon
Dionysos
Déméter
Les Héros
Sommaire Religion grecque
Sommaire Histoire grecque antique
Accueil Grectel

II. Les dieux grecs
4. Dionysos

Commençons par un aveu d'impuissance. Le culte de Dionysos n'a jamais été expliqué totalement non plus que la nature profonde du dieu. C'est par là que l'on peut comprendre l'emprise extraordinaire qu'il a exercée sur les esprits grecs, latins et modernes.

  1. Un dieu étranger

    C'est un des dieux qui ont eu le plus d'influence sur la civilisation grecque et la civilisation en général. Depuis sa naissance miraculeuse et tout au long de son histoire, il existe dans sa vie, dans son histoire, dans son culte, quelque chose auquel on ne trouve aucune analogie exacte, de raison plausible ni d'origine soupçonnable, mais des contradictions irritantes, des bestialités archaïques et sauvages, mais une sérénité sublime.

    Les fêtes en son honneur se déroulent aussi bien en hiver qu'au printemps ou en été. Les solennités sont aussi bien diurnes que nocturnes. A côté d'un aspect exubérant et joyeux, elles présentent une veine sombre et farouche. Il est représenté comme dispensateur de toute bonne chose aussi bien que comme mangeur de chair crue et dispenseur d'horreur. Il prend des formes humaines, animales ou végétales. Il a des rapports avec la mer. Il préside à des scènes d'hystérie telles qu'on l'appelle le dieu fou, mais en même temps, il est d'une sérénité divine.

  2. Le culte de Dionysos

    1. Les orgies

      Les orgies sont des cérémonies mystérieuses, réservées à des initiés et destinées à donner l'ivresse divine et à faire d'eux des dieux.

      Les orgies se déroulaient souvent la nuit. Les femmes n'étaient pas les seules à y participer, mais elles en étaient les actrices principales et les plus assidues. C'est là un phénomène étonnant en Grèce. Le plus grand don de Dionysos, c'est celui de l'émancipation, un sentiment de liberté totale.

      Les femmes ont toutefois, pour les mener, un prêtre dont elles forment le cortège (thuasis), un adolescent aux longs cheveux d'apparence efféminée, qui est possédé de l'esprit divin et appelé bacchos. Vêtues de peaux de bêtes, de faon, le thyrse à la main (une baguette assez longue entourée de lierre et de pampre de vigne), couronnées de lierre, les zélatrices de Dionysos, les Bacchantes ou Ménades, suivent le prêtre dans les coins les plus sauvages des montagnes, absorbées dans des danses frénétiques et des courses folles. Beaucoup portent un serpent. Leur danse s''ccompagne de musique barbare, tympanon, flûtes de roseau, cymbales, dans une atmosphère incroyable:  lire les Bacchantes d'Euripide. Cette musique jour un rôle fondamental. Cf. Barrès, Enquête au pays du Levant - Soirée avec les Bacchantes. On la retrouve dans le tambourin de Thésée.

      A cela s'ajoute la lueur fumeuse des torches, et peut-être le vin. L'usage du vin a été contesté. Le vin était avec le lait et le miel un des dons miraculeux de Dionysos à ses fidèles. Dionysos est le dieu de la vie liquide sous toutes ses formes, sang, lait, vin, semence du mêle, sève. " Au riche comme au pauvre, la plénitude apaisante du vin. L'éclat liquide de la grappe coule dans les repas des dieux. "

      L'orgie était-elle caractérisée par la licence sexuelle ? Les avis sont partagés. Les Bacchantes d'Euripide nient cet aspect, mais dans Ion, du même Euripide, le héros dit avoir été engendré pendant une orgie dionysiaque.

      Vin, musique, danse, conduisent à l'ekstasis, le fait d'être projeté hors de soi. Dans cet état, les adoratrices et les adorateurs avaient des visions et rien ne leur était impossible. La force, l'invulnérabilité des Ménades sont bien évidemment du ressort de l'hystérie. Dans cet état de délire, les Ménades étaient prêtes pour le rite suprême, l'assimilation au dieu, par le repas sacré fait de sang, qui achève l'ivresse, et de chair crue. Ici se sattache le principe fondamental du meurtre rituel. A l'origine, la victime a certainement été un bébé. A l'époque classique, des rites rappellent encore ce sacrifice. A Orchomène, le prêtre poursuivait des femmes, l'épée à la main, et s'il en attrapait une, il avait le droit de la tuer. Le matin de Salamine, Thémistocle dut sacrifier trois jeunes Perses prisonniers à Dionysos. Puis, ce fut un animal qui représentait le dieu et qu'on dévorait pour s'assimiler à la nature divine.

    2. Le rite de la résurrection

      Dionysos incarne le rite, étonnant pour le primitif, du lever du soleil, mais aussi de la mort et de la résurrection de la végétation. Il est encore plus celui de la germination du grain de blé. C'est le miracle, le drame en plusieurs actes de l'univers. Dionysos incarnera ce drame : mis à mort par ses ennemis, il est rappelé à la vie.

      La commémoration de ce retour à la vie est essentielle. Elle se fait au printemps, et plus précisément à l'équinoxe, au moment où le jour devient plus long que la nuit. Les fêtes ne sont pas nécessairement annuelles, elles peuvent être biennales ou triennales, symbole de l'assolement. Le fidèle de Dionysos, alors, accomplit les cérémonies de la résurrection du dieu, mais au-delà, il espère que lui, fidèle de Dionysos, possédé du dieu, obtiendra, à l'image du dieu, la résurrection.

      La religion dionysiaque est une religion de salut.

  3. Les origines du dieu

    1. Dionysos est-il un grec ?

      Des légendes grecques introduisent Dionysos dans le panthéon hellénique : elles firent de sa mère Sémélé une princesse de Thèbes. Elle avait fait, dit-on la conquête de Zeus. Tête de Héra. Héra suggère à Sémélé de demander à Zeus de se manifester sous sa forme la plus divine et la plus majestueuse, ce qui fut fait : elle fut foudroyée. Son fils cependant fut sauvé, tiré du sein de sa mère et placé dans la cuisse de Zeus, et ce fut au terme logique de cette vie on n'ose dire utérine que naquit Dionysos.

      Homère, au livre III de l'Iliade, nous rapporte une autre histoire, celle d'un dénommé Lycourgos qui poursuivait les nourrices de Dionysos sur les montagnes de Thrace. L'enfant-dieu épouvanté se jeta dans la mer et Thétis lui ouvrit les bras. Zeus, pour le punir, aveugla Lycourgos qui mourut peu après.

      Ces légendes sont bien évidemment des aitia. En fait, il ne s'agit que de justifier la présence d'un Dionysos qui n'est pas grec. Tout, dans le personnage, dans ses rites, devait choquer les Grecs. Ces orgies, ces transes collectives, cette hystérie sont à l'opposé de la connaissance de soi-même, de tous les préceptes apolliniens, de la mesure, du goût de l'harmonie. Dionysos est l'incarnation de l'hubris. Choquants aussi pour les Grecs le rôle et l'attitude des femmes. Dans les Bacchantes d'Euripide, Penthée résume la situation : " Cela dépasse vraiment les bornes s'il nous faut à présent supporter pareilles sottises de ces femmes. " Choquantes encore les idées sur la mort et la résurrection du dieu, qui sont fondamentalement étrangères à l'esprit grec pour qui tout dieu doit être immortel. Choquant enfin le culte : pour le riche comme pour le pauvre. Un culte populaire. C'est le petit peuple qui le premier y trouve des satisfactions. Un culte qui admet tout le monde, même les esclaves, c'est difficile à admettre chez des Hellènes. C'est en partie parce qu'il a des préférences aristocratiques qu'Homère ne parle presque pas de Dionysos. La religion de Dionysos est bien une religion étrangère, elle est l'invasion du monde barbare. Plusieurs textes confirment cette origine étrangère. Dans les Bacchantes, Penthée dit : " ce dieu nouveau que je ne connais pas " et Dionysos de dit lui-même étranger. A Sparte, on adorait un héros inconnu qui aurait guidé le dieu vers la Laconie. Enfin, de nombreuses légendes nous montrent les résistances farouches opposées à l'introduction de son culte un peu partout en Grèce. Dionysos est venu d'ailleurs et n'a pas été accepté immédiatement par les Grecs.

    2. D'où vient Dionysos ?

      Hérodote, qui confirme que Dionysos est d'introduction récente, était persuadé que le dieu venait d'Egypte. Il serait sage se songer à la Crète. Dionysos ne serait égyptien que dans la mesure où la Crète a fait certains emprunts religieux à l'Egypte. Un syncrétisme donc aurait pu se réaliser en Crète entre Dionysos et le Zeus de l'Ida.

      Une deuxième origine plus sérieuse nous est proposée : la Phrygie, c'est-à-dire l'Asie Mineure. Le premier chœur des Bacchantes dit : " Faites descendre Dionysos des montagnes phrygiennes " et Dionysos déclare : " Délaissant les champs où l'or abonde des Lydiens et des Phrygiens… "

      Il est incontestable que les rapports sont extrêmement étroits entre notre Dionysos et la divinité phrygienne Sabazios, dont le nom devient parfois le nom de culte de Dionysos. Par ailleurs, Sémélé, mère de Dionysos, existe en Phrygie sous le nom de Zémélis. La religion de Dionysos est bien du même type orgiastique que les cultes de la terre-mère et les cortège des Corybantes rappelle le cortège des Satyres, les Grecs ont souvent mêlé les deux. Le verbe korubantô veut dire " être en proie aux hallucinations sacrées ". Attis, l'époux de Cybèle, déesse-mère de Phrygie représente, comme Dionysos, tout l'élément liquide de la nature.

      Les rites dionysiaques ont été souvent comparés aux danses sacrées des derviches maulevis, un ordre fond' en Asie Mineure au XIIIe siècle ap. J.-C., l'ordre musulman des derviches tourneurs.

      Le même esprit se remarque aussi dans les activités des montanistes. Montanus vivait en Asie Mineure au début du IIIe siècle ap. J.-C.. C'est le père de l'hérésie dite montaniste, mais on a affaire ici à des chrétiens. Montanus créa une église dans laquelle les prêtres, et même les évêques étaient des femmes. Ces femmes entraient en transe comme les Ménades, se disaient possédées par Dieu, et prophétisaient. Cette hérésie avait même été accusée de crimes rituels. Or elle était née en plein cœur de la Phrygie.

      On parle aussi d'une origine thrace. Hérodote nous dit que les seules divinités adorées en Thrace étaient Dionysos, Artémis et Arès. Nous savons, nous que les Thraces, depuis la nuit des temps, adoraient un dieu de la nature, de la végétation, de la chaleur et de la fertilité dont l'attribut était le lierre et qui jouait un rôle essentiel dans la vie des hommes et dans leurs activités agricoles. Le dieu avait un cortège orgiastique, il se plaisait sur les sommets boisés et se recueillait dans des grottes tapissées de lierre. Homère nous le représente bercé par des nymphes. Il aurait été le premier à accoupler des bœufs. Le plus fameux de ses oracles est celui de Satres et, comme à Delphes, c'est une femme qui répond. La vénération du dieu se manifeste par des transports d'ivresse mystique, à base de vin de Maronée.

      Thrace ou Phrygie ? Les habitants de ces lieux sont de même race.

    3. La marche de Dionysos

      Dionysos a dû venir à la fois de Thrace par voie de terre et de Phrygie par le relais des îles. Il a progressé régulièrement vers la sud où son culte a rencontré la religion du Zeus crétois et de sa suite de Courètes. C'est un taureau qui symbolise le Zeus Crétois et c'est aussi une des formes de Dionysos. On assiste donc à une assimilation du Zeus idéen et de Dionysos. Dans les Bacchantes, on invoque ensemble des dieux phrygiens, lydiens, crétois, et satyres, Zeus, Silène, Bacchus et Dionysos sont mêlés.

      Pour Homère, Dionysos n'est pas tout à fait inconnu mais presque. Il n'a pas d'importance ; on peut dire qu'à la fin du VIIIe s. Dionysos est pratiquement inconnu. A la fin du Ve, il est attesté et bien adopté. Entre 700 et 400 donc, on le voit progresser, au moment où l'on passe de la ville sacrée féodale à la cité. Il y a peut-être une relation entre la démocratie et la pénétration du culte thraco-phrygien. Mais ce qu'il y a de sûr, c'est que la conquête de Dionysos n'a pas été facile. Il y a des aitia ne serait-ce que celle qui veut que Dionysos soit jeté à la mer.

      Au Ve siècle, Thèbes était considéré comme le centre du culte dionysiaque. Lorsqu'une cité désirait installer le culte de Dionysos, des Ménades étaient dépêchées par Thèbes pour organiser les nouveaux rites, avec l'approbation de l'oracle de Delphes. Mais même à Thèbes, persista une opposition au culte. Trois filles de Cadmos, roi de Thèbes, les trois sœurs de Sémélé niaient la divinité de leur neveu, et le fils de l'une d'elles, cousin germain de Dionysos, Penthée, s'opposait à l'introduction des rites dionysiaques à Thèbes. Dionysos se vengea en envoyant la folie aux femmes de Thèbes qui déchirèrent Penthée, et il causa la folie des filles de Proétos, roi d'Argos.

      Une autre légende attique prend pour thème cette résistance. Au temps du légendaire roi Pandion, un devin, Icarios, reçut le dieu lorsque celui-ci vint à Athènes et lui offrit l'hospitalité. Dionysos fut très touché en en signe de reconnaissance apprit à Icarios la viticulture et lui révéla les bienfaits sournois du vin. Icarios fit goûter le vin aux paysans de l'Attique, et ces pasans qui ne buvaient que de l'eau et du lait ressentirent, après avoir avalé le breuvage, des effets curieux. Ils crurent qu'Icarios les avait empoisonnés, le poursuivirent et le tuèrent. La fille d'Icarios se pendit de désespoir. Dionysos fut outré. Il se vengea en frappant de folie les femmes de l'Attique qui allèrent se pendre. Les habitants de l'Attique instituèrent des fêtes en l'honneur de la fille d'Icarios ; des statuettes étaient pendues aux branches des arbres et Dionysos fut accepté.

      Toutes ces légendes traduisent la résistance historique de la Grèce à Dionysos.

    4. Réactions

      Comment le culte de Dionysos a-t-il réagi sur les Grecs et inversement ?

      Première remarque : les Grecs n'ont pas accepté telle quelle la religion dionysiaque. Ils l'ont accordée à leur génie et la religion originelle leur est restée en grande partie étrangère tant elle fut adaptée et transposée.

      Deuxième remarque : les rites orgiastiques primitifs n'ont pas été totalement éliminés. A Delphes, en hiver, sur le Parnasse, une troupe de Ménades participait à une course sur la montagne avec des thiases. Dionysos au fait ne s'est pas adapté au moule oligarque, il est resté à part. Il s'est attaché le petit peuple rural qui a transposé les rites de fécondité.

      Troisième remarque : le culte dionysiaque entraîne les esprits vers une conception nouvelle de l'âme humaine dans laquelle l'immortalité joue un grand rôle. Les Grecs, entraînés sur ce chemin, se sont arrêtés en cours de route. Ils n'ont cru qu'à une possession passagère du dieu. L'extase, à leurs yeux, 'était que temporaire ; quand elle cessait, le mortel revenait à sa pauvre humanité. Dans les Bacchantes persiste le contraste entre ce qui est mortel et ce qui est divin. Dionysos n'est pas assez puissant pour changer les conceptions grecques sur l'âme, la mort ou la divinité, mais il le deviendra.

  4. Les fonctions de Dionysos

    Les fonctions de Dionysos sont nombreuses et faciles à adapter aux rites agraires locaux, puisqu'elles présentent souvent un caractère rural.

    1. Dieu de la végétation

      Dionysos, c'est le dieu de la végétation et d'abord de la végétation sauvage. Il est Dionysos endendros et se manifeste dans la sève. Sa plante préférée est le lierre et son arbre le pin. On suspendait aux branches de pin des masques de Dionysos en terre cuite. Il est ensuite le dieu des vergers et des jardins, de la vigne et du figuier. Son père nourricier est un ivrogne de taille : Silène. C'était un homme assez renfermé. Il ne parlait qu'en état d'ébriété, mais alors là, il prédisait l'avenir et émettait des pensées profondes. " De toutes choses, la meilleure pour l'homme, ce n'est pas de vivre, c'est de ne pas naître ; c'est, une fois né, de mourir le plus tôt possible. "

      Dionysos finit par devenir le dieu de tout principe liquide. Son culte est fréquemment associé à celui des Nymphes. Des sources lui sont consacrées. Il a des temples dans des lieux humides. Il est le dieu de la fécondation. Le taureau est le symbole des transfigurations du dieu.

    2. Dieu du monde souterrain

      Divinité des morts, Dionysos Zagreus donne à ses initiés une éternelle félicité, car ce sont les tanants des sectes secrètes, des mystères, qui ont accueilli Dionysos.

    3. Dieu prophète

      Les esprits de la terre ont toujours des dons divinatoires. Pourtant, nous ne connaissons qu'un oracle de Dionysos, Amphicléia en Phocide. C'étaient surtout des malades qui venaient consulter. Après une période où Dionysos devait leur apparaître en songe, ils repartaient guéris ou on leur donnait les moyens de guérir, selon un processus qui ressemble aux cures d'Asclépios à Epidaure.

    4. Dieu conducteur des hommes

      Dionysos hègémôn préside à l'organisation de la cité, de l'état, comme à la conduite personnelle de l'homme. Il inspire les hommes et l'ivresse bachique a des rapports étroits avec l'inspiration artistique. Le théâtre, le dithyrambe, la danse viennent de Dionysos. Tous les artistes lyriques, danseurs, acteurs et auteurs se groupent sous le nom d'artistes dionysiaques.

  5. Les fêtes de Dionysos

    Les fêtes de Dionysos se répartissent suivant un cycle. Toutes ont un caractère rural ou mortuaire.

    1. Les oschophoria

      Les oschophoria se déroulent au mois d'octobre. Elles sont une fête des vendanges dont elles tirent leur nom précisément, puisque les oschophores sont des porteurs de pampre de vigne. Le cortège, en tête duquel marchaient deux adolescents, partait du Limnaion, sanctuaire athénien du dieu du vin, et se rendait à l'Oschophorion de Phalère, lieu du débarquement de Dionysos. On chantait Eleleu iou iou. Un banquait était suivi d'un concours athlétique (course). Le vainqueur avait droit à un breuvage huile, vin, miel, fromage râpé et farine d'orge. Puis, en bandes joyeuses qu'on imagine facilement, on revenait vers Athènes à la nuit tombante.

    2. Les dionysies champêtres

      Les dionysies champêtres avaient lieu au mois de Poseidon, en décembre-janvier. Elles étaient l'occasion de plaisirs innocents : des jeunes gens sautaient pieds nus sur des outres gonflées et huilées. Ce jeu s'appelait askoliasmos, de askoi, les outres. Ce n'était pas méchant. Mais ce n'était pas l'essentiel. L'essentiel, c'est une pompè, une procession où l'on portait les emblèmes de la fécondité. En tête, les canéphores, les porteuses de corbeilles contenant les offrandes destinées au dieu. La procession est suivie de chants et de danses mimées au cours desquels plusieurs dèmes rivalisaient. Ces chœurs s'appelaient kômoi, ancêtre lointain des grands chœurs tragiques et comiques des pièces classiques. Le dème d'Icaria aurait joué un rôle de tout premier ordre : c'était le dème de la maison de Thespis, l'inventeur de l'art théâtral. Les fêtes se déroulaient dans les dèmes sous l'égide des démarques. Ce pouvait être assez impressionnant ou extrêmement simple. A partir du Ve siècle, les dèmes les plus riches ajouteront aux kômoi des représentations dramatiques.

    3. Les lénéennes

      Les lénéennes sont des fêtes moins agrestes, en l'honneur de Dionysos maître des orgies, au mois de Gameleion, à la fin de janvier. On a pensé que le mot lénéennes venait de lènai, les pressoirs. Seulement, à la fin de janvier, le raisin est pressé depuis longtemps. Mais le mot Lènai signifie aussi les Ménades, et elles dansaient sur le mont Lènaion. On s'y livrait à des danses sacrées, puis on y ajouta en 442 des représentations dramatiques sous forme de comédies et en 433 on ajouta des tragédies. Le théâtre de bois ne fut abandonné qu'au IVe siècle av. J.-C. au profit du théâtre de Dionysos en pierre qui existe encore au pied de l'Acropole. Noter dans cette fête le rôle du clergé d'Eleusis. Le dadouque (porteur de torche) éleusinien criait aux fidèles " Appelez le dieu ".

    4. Les anthestéries

      Les anthestéries avaient lieu les 11, 12 et 13 du mois d'anthestérion, fin février, début mars. Ce sont les plus anciennes fêtes qu'on ait célébré à Athènes en l'honneur du dieu. Elles dépassaient largement le cadre attique. Elles se déroulaient dans le sanctuaire de Dionysos en limnais, aux marais, entre la Pnyx et l'Aréopage. Chacun des trois jours de fête avait son nom propre. Le premier était celui des pithoïgia, l'ouverture des jarres, le second celui des choes, celui des conges (pot et mesure de capacité), le troisième celui des chitroi, des pots à verser le vin.

      Le jour des pithoïgia appartenait au dieu du renouveau, au dieu de la réjouissance de la vigne. On ouvre solennellement les jarres, les pithoi, et on goûte le vin de la dernière récolte. Jusque là, le moût était tabou.

      Le jour des choes, avait lieu un concours de beuverie. Chaque buveur venait avec son chous, trois litres. Le gagnant remportait une outre. Sans lâcher son pot, on se rendait devant la maison de la prêtresse du dieu, la femme de l'archonte-roi. Oncélébrait alors le mariage de Dionysos et de sa prêtresse devant le Boukolion, la maison des bouviers ? Ce mariage avait une valeur magique : il symbolisait la fécondité et devait la procurer à la cité. D'où la nécessité pour la femme d'avoir été épousée par l'archonte-roi en premières noces et jeune fille. Dionysos, représenté par l'archonte-roi, arrivait donc au Limnaion, le sanctuaire des marais, venant de la mer. Il prenait la reine pour épouse et tous deux étaient conduits au Boukolion où le mariage était consommé. De ce mariage dépendait la prospérité générale de l'Attique. Cette fête des choes avait un troisième aspect, funèbre. On croyait que les morts, ce jour-là, revenant sur la terre, envahissaient les maisons où ils avaient vécu. Afin que leur influence ne soit pas néfaste, le matin même des choes, on mâchait de l'aubépine et on mettait de la poix sur la porte de la maison. Le quatrième aspect de cette fête était celui d'une fête des enfants. Ceux qui devaient avoir trois ans dans l'année étaient couronnés de fleurs et on leur offrait des cadeaux. Une tombe du cimetière du Céramique porte l'inscription " Il avait l'âge des choes, mais un mauvais démon est venu avant elles. " Finalement, en dépit de quelques aspects tristes, c'était plutôt une journée joyeuse.

      Le jour des chitroi, la pensée des morts occupait les esprits des Athéniens. Ils faisaient cuire dans l'âtre une sorte de soupe qu'ils offraient aux dieux chthoniens et ils priaient pour leurs morts. Cette soupe était d'abord destinée aux défunts, qui la recevaient par une fissure dans le sanctuaire de Zeus olympien. On leur offrait aussi de l'eau, de l'orge et du miel. Sur quoi les morts étaient priés de partir. On les chassait en criant " Partez, esprits des morts, les anthestéries sont finies ! "

    5. Les grandes dionysies

      Par opposition aux dionysies champêtres ou petites dionysies, les grandes dionysies étaient aussi appelées dionysies urbaines. Elles avaient lieu du 8 au 13 du mois d'Elaphébolion, fin mars, début avril. Elles se déroulaient dans le sanctuaire de Dionysos eleuthèreus, au pied de l'Acropole. La fête comportait une procession, et les trois derniers jours étaient consacrés aux grands concours dramatiques. C'est à cette occasion que l'on créa le " théorique ", une subvention offerte aux Athéniens pour leur permettre d'assister aux spectacles.

 

Haut de page Suite Retour
Zeus | Athéna | Apollon | Dionysos | Déméter | Les Héros | Sommaire
© 1964-66, M. Rodier - 2001, Grectel