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L'HELLÉNISME SOUS LA DOMINATION OTTOMANE

B. Au XVIIIe s. : L'hellénisme asservi change de situation

3. Résistances et insurrections populaires : les limites des affrontements

Résistance, insurrections et incidents divers ont constitué une situation permanente dans les relations de l'hellénisme asservi avec les Turcs pendant toute la durée de la turcocratie. Naturellement, sur une durée aussi longue, les affrontements n'ont pas toujours eu le même caractère ni la même fréquence, ni la même intensité. On peut distinguer trois phases dans les soulèvements populaires.

  • dans une première phase : pendant les trois premiers siècles de la turcocratie, la libération de l'envahisseur était attendue par l'occident chrétien ; les Européens exploitaient ce fait chaque fois qu'ils étaient en guerre contre l'empire ottoman, ils faisaient de la propagande pour la libération des chrétiens asservis dans l'empire, lesquels s'insurgeaient ; naturellement, à la fin, ils étaient abandonnés par les Européens et devaient subir les conséquences de leurs soulèvements ;

  • dans une deuxième phase : lors de la seconde moitié du XVIIIe s. eurent lieu des guerres successives entre la Russie et l'empire ottoman : les Grecs asservis éprouvèrent une grande émotion parce que les Russes étaient les seuls chrétiens orthodoxes non asservis, constituaient une grande puissance et protégeaient les chrétiens de l'empire ottoman. Au cours des deux guerres russo-turques (1768-1774 et 1787-1792) les espoirs des Grecs s'enflammèrent, dans le Péloponnèse fut organisé le grand soulèvement de 1770 - il fut noyé dans le sang et les Péloponnèsiens subirent de rudes épreuves - et avec le traité de Kioutsouk-Ka‹nartzi (1774) la Russie assumait la protection des chrétiens asservis et donnait la possibilité aux navires grecs d'utiliser leur pavillon pour faciliter leur circulation.

  • dans la troisième phase : les soulèvements et l'esprit général de résistance des débuts du XIXe s. étaient inspirés par l'esprit de liberté (philéleuthérisme), puis par la Révolution Française, et avaient un contenu social : l'adversaire principal était bien sûr les occupants Turcs, mais on voyait aussi prendre part à l'oppression générale, à cause de leur situation et de leur politique, des Grecs de l'administration et de la finance ; c'est pourquoi les soulèvements se retournèrent aussi contre eux.

 

L'esprit de résistance de l'hellénisme asservi s'exprimait de diverses manières, du simple larcin et du vol organisé jusqu'à l'insurrection ; une expression permanente de l'esprit et de la pratique de la résistance de l'hellénisme étaient les klephtes. C'étaient de pauvres paysans opprimés qui "prenaient le maquis" pour combattre l'envahisseur et toute forme d'oppression ; leur résistance constituait une pratique consciente qui exprimait l'aspiration nationale. La résistance klephte fut un sujet qui inspira plus que tout autre la poésie populaire.

Ci-contre : Un klephte.
Amartoles et klephtes ont constitué le noyau militaire expérimenté de l'armée de la Révolution.

Un klephte (Cliquer pour agrandir)

 

Andritsos l'armatole (Cliquer pour agrandir) Le développement de la résistance klephte inquiéta l'occupant qui eut recours au leurre de l'armatolisme pour y mettre fin. Les armatoles étaient des corps armés rétribués au service de l'administration turque chargé de la surveillance des vallées étroites et du maintien de l'ordre. De nombreux klephtes devinrent armatoles, de même que de nombreux armatoles mécontents devinrent klephtes.

Ci-contre : L'amartole Andritsos, père du héros de la Révolution Odysséas Androutsou.

 

En général, la résistance klephte constituait une menace permanente pour l'ordre public dont les Turcs faisaient une priorité. C'est pourquoi, lorsque le mouvement klephte eut pris une extension considérable, à la fin du XVIIIe s. et au début du XIXe s., le pouvoir turc se livra à des mesures de destruction systématique : l'anéantissement du mouvement klephte dans le Péloponnèse au début du XIXe s. (parfois avec la complicité des échevins) priva les Grecs asservis de leur plus ferme appui et de leur espoir le plus solide.

 

Témoignage

Au temps de ma jeunesse, où j'aurais pu apprendre quelque chose, il n'y avait pas d'écoles, pas d'universités, à peine de petites écoles où l'on apprenait à lire et à écrire. Les vieux échevins, qui étaient les premiers magistrats de la cité savaient à peine écrire leur nom. La plupart des prêtres ne connaissaient que le rituel, par la pratique, et aucun n'avait appris quoi que ce soit. Les psaumes, le missel, les prophètes étaient les livres que je lisais.

T. Kolokotronis

Le manque d'éducation était un regret constant pour l'hellénisme asservi. Ce n'est qu'à la fin du XVIIIe s. que les choses commencèrent à évoluer.

 

4. Extension de l'éducation : la création artistique