L'HELLÉNISME SOUS LA DOMINATION OTTOMANE
B. Au XVIIIe s. : L'hellénisme asservi change de situation
2. Société dominante et société asservie : les conditions de vie
Sur le territoire grec, il a fallu, pendant quatre siècles, que
cohabitent deux communautés : la communauté grecque,
asservie, et la communauté turque, dominante, celle des occupants. Entre
ces deux communautés s'était élevé un mur
infranchissable, la haine du chrétien occupé envers le musulman
occupant. Il fallait bien pourtant que s'établissent des relations. Les
notables grecs, de par leur position d'administrateurs-producteurs - et quelques-
uns par intérêt, avaient de fréquents contacts avec les
administrateurs grecs des différents services. Les paysans grecs
travaillaient dans les propriétés des Turcs. Diverses autres
catégories de Grecs, et même les lettrés
(secrétaires, médecins, etc.) étaient au service des pachas
turcs. Parfois, entre ces Grecs et ces Turcs, se tissaient de bonnes
relations.
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Un Sultan. Il était monarque absolu et
représentant de Dieu sur la terre. Le gouvernement de son immense empire
se faisait sur la base de la loi sacrée à laquelle devaient se
conformer même les décrets du sultan (firmans). Pourtant,
malgré la stricte organisation hiérarchique de sa
communauté, l'empire ottoman est l'un des rares pays dans l'histoire
où les lois n'étaient pas appliquées par les organes
prévus pour les appliquer. La politique et l'administration de l'empire
ottoman s'appuyaient sur l'arbitraire et le pillage. |
Cependant, indépendamment de ces relations, dont certaines
s'établissaient au niveau personnel, les relations globales entre la
communauté dominante et la communauté asservie étaient des
relations d'obéissance permanente de la seconde envers la
première. La communauté asservie essayait de survivre,
résistait comme elle pouvait et, lorsque les conditions le permettaient,
s'insurgeait. Les principaux éléments qui régissaient la
relation de l'occupant et de l'ocupé, à part, bien sûr, la
privation de liberté, des biens, etc., étaient les
suivantes :
les asservis payaient de lourds impôts :
c'étaient surtout la capitation (haratsi) et la dîme
(le dixième de la production). Souvent, venaient s'ajouter des
impôts spéciaux : le bakchich (sorte de cadeau
obligatoire), était une situation généralisée, de
même que le pillage. Le producteur n'était jamais sûr que sa
récolte lui appartenait, et le marchand ne bénéficiait pas
toujours d'une circulation libre et sûre de ses marchandises.
les asservis devaient subir toutes sortes de pressions et
d'humiliations. Outre la conscription arbitraire et forcée, et
l'islamisation des enfants grecs (paidomazôma), qui a cessé
vers le milieu du XVIIe siècle, bon nombre d'interdictions et de
limitations provoquaient chez les Grecs un sentiment d'humiliation. On leur
interdisait de construire des églises et de sonner les cloches, de monter
à cheval, de porter les armes, d'être cités comme
témoins au tribunal. De plus, ils devaient porter des vêtements
spéciaux. Il suffit de s'imaginer la situation des Grecs asservis, avec
toutes ces limitations et toutes ces obligations, d'ajouter à cela les
conditions matérielles catastrophiques que connaissaient certains d'entre
eux, pour expliquer les résistances, les insurrections et les incidents
qui seront brièvement exposées ci-après.
3. Résistances et insurrections populaires : les limites des affrontements
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