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L'HELLÉNISME SOUS LA DOMINATION OTTOMANE

A. Catastrophes, obscurité et premiers soubresauts :
les limites de l'extension turque et de l'opposition grecque (XVe-XVIIe s.)

2. La défaite de l'hellénisme : catastrophes matérielles et démoralisation.

La peur et la désolation gagnèrent les esprits et les corps des Grecs au passage des Turcs ; souvent, la sauvagerie dépassait les limites connues. L'envahisseur ne s'occupait que de réprimer tout soulèvement et et restait indifférent à l'étendue de la catastrophe. Le Grec se voyait tout perdre ses hommes, ses biens, et jusqu'à son moral.

En effet, la fougue conquérante et la folie des Turcs provoqua de terribles catastrophes matérielles qui eurent des conséquences durables et modifièrent l'aspect et le caractère du lieu. La première catastrophe concernait l'économie en général : à la fin de l'époque byzantine, avaient commencé à se manifester les signes d'un essor commercial et artisanal, et dans les régions grecques, comme cela s'était également produit dans les régions européennes.

 

Spahi turc (Cliquer pour agrandir) Un spahi turc à cheval. Les spahis étaient les cadres fondamentaux de l'armée turque, possédaient des fiefs - seigneuries d'assez petite étendue - et s'occupaient de la guerre, fournissant leur propre équipement : cheval, armure, armement, tente. Ils étaient comparables aux chevaliers de la féodalité européenne.

 

La société et l'économie turques en étaient au stade de l'organisation féodale, et ainsi, la conquête des régions par les Turcs Ottomans arrêta la croissance du commerche et de la production artisanale. La zone grecque fut intégrée au système féodal ottoman, et ce fut une régression importante. Pendant au moins deux siècles, l'hellénisme fut commercialement coupé de l'Europe. Un autre changement très important fut celui qui a concerné la production agricole et l'économie. Dans ce domaine, le changement principal n'a pas été la destruction des récoltes, qui se produit toujours en cas de guerre, mals un changement dans la propriété de la terre : selon le droit islamique (la loi sacrée de l'Islam), la terre conquise par fait de guerre, c'est-à-dire lorsque les habitants d'une région offrent une résistance, appartient à Dieu et est donc placée sous le contrôle et à la disposition du Sultan qui est le représentant de Dieu sur terre. Ainsi, le Sultan octroyait les propriétés conquises aux dignitaires de l'armée, comme récompense pour l'extension et la propagation de l'islam. C'est ainsi que se forma une aristocratie militaire turque de la terre, qui prit la place de l'aristocratie byzantine.

 

A la fin du XVIIe siècle, les Vénitiens, qui détenaient la totalité du Péloponnèse, passèrent en Attique et bombardèrent l'Acropole : ce fut une des premières fois où les Turcs subissaient une défaite et perdaient du terrain. Les Grecs attendaient toujours l'aide de l'Occident Chrétien. La religion, qui était différente de celle des Turcs, a constitué pendant les deux premiers siècles de la Turcocratie, le seul soutien de l'opposition nationale à l'envahisseur. Bombardement de l'Acropole par Morosini (Cliquer pour agrandir)

 

Un autre changement important fut marqué dans la population : sa diminution à cause des guerres et de la conquête, et les déplacements collectifs de région à région. Diminution et déplacements transformèrent qualitativement et quantitativement les relations de l’hellénisme avec la région. En 1520, les habitants de ce qui est aujourd’hui la Grèce épaient un peu plus de 2 000 000, alors qu’en 1700, les Grecs habitant l’ensemble de l’Empire Ottoman étaient à peu près 1 500 000. Beaucoup avaient été tués, beaucoup, qui avaient perdu leurs biens, s’étaient réfugiés en Europe (les plus riches) ou s’étaient déplacés des plaines vers les montagnes (les plus pauvres). Ainsi, les villes et les plaines fertiles restèrent sous le contrôle presque absolu des Turcs pendant au moins deux siècles.

Mais au-delà de ces catastrophes matérielles, la baisse du moral eut une importance particulière pour l’hellénisme. Certes, ce n’était pas la première fois que les Grecs Byzantins connaissaient des ennemis ou des conquérants ; mais les Turcs étaient particulièrement durs et l’extension de leurs conquêtes, qui se montraient incontestables et nullement provisoires, semblaient démontrer la supériorité de l’Islam sur la chrétienté. Le sentiment d’une telle défaite fit fléchir le moral de l’hellénisme, et constitua, au moins au début de la turcocratie, le danger le plus grand qui menaça son fondement même, son existence en tant que collectivité nationale particulière.

3. Foi et résistance : premières cellules de regroupement national : organisation de l'hellénisme asservi.