Index IPHIGÉNIE


l'offrande de la vierge





Le sacrifice à Artémis d'Iphigénie, fille première-née d'Agamemnon et de Clytemnestre, est un mythe aussi ancien que celui de la guerre de Troie, chanté par l'épopée archaïque. Iphigénie elle-m6eme, cependant, est la première à acquérir la dimension tragique de l'héroïne souffrante dans l'oeuvre d'Euripide. Son Iphigénie à Aulis décrit, d'une manière inoubliable, les sentiments de la victime sacrificielle à l'égard du sacrificateur.

Les Grecs sont assemblés à Aulis, prêts pour la campagne. Mais le vent ne souffle pas, et les bateaux ne peuvent mettre à la voile. Artémis exige la fille première-née du roi des rois, Clytemnestre vient d'Argos, amenant Iphigénie pour un mariage qui n'aura jamais lieu. Les chefs de guerre exigent le sacrifice, Agamemnon hésite, Clytemnestre jure et Iphigénie, chantant la joie de vivre, supplie son père et sacrificateur de la sauver, de la manière la plus émouvante :

    Le rameau que ma main suppliante enlace à tes genoux, c’est ce corps, que ma mère a pour toi mis au monde ; ne me fais pas périr avant l’heure ! [...] Contempler cette céleste lumière, c’est, pour les mortels, la plus douce chose ; aux Enfers, il n’est plus de joie ; insensé qui souhaite de mourir ! Une vie misérable vaut mieux qu’une belle mort !

Euripide, Iphigénie à Aulis 1216-1218, 1250-1252
(Trad. Henri Berguin et Georges Duclos)

Cependant, au moment critique, Iphigénie de laisse fléchir. L'intervention d'Achille qui, de faux prétendant se montre véritable protecteur, et la menace du massacre général, lui font accepter la mort afin d'éviter de verser encore un sang inutile.

    La vie d’un seul homme, sous le soleil, est plus précieuse que celle de milliers de femmes. - Et s’il est vrai qu’Artémis ait voulu me prendre pour victime, vais-je mortelle, entraver les desseins d’une déesse ? Va, c’est impossible. Je donne mon corps à la Grèce. Sacrifiez Iphigénie, allez détruire Troie ! Voilà les monuments que je léguerai à la longue mémoire des siècles ; ce sont là mes enfants, mes hyménées, ma gloire !

Euripide, Iphigénie à Aulis, 1394-1399
(Trad. Henri Berguin et Georges Duclos)

Seule, de son plein gré, la jeune ville s'avance vers l'autel. Son noble geste l'exalte, en fait une offrande digne de l'entreprise qui commence. Libérée de la tension de la culpabilité, les hommes s'abandonnent à leur émotion et à leur admiration. Mais au moment précis où le poignard du sacrificateur va atteindre sa gorge, Iphigénie disparaît. Elle est enlevée par Artémis, et à sa place, une biche frémit, pantelante, sur l'autel.

Désormais consacrée pour toujours à la déesse, la Vierge, à la fois sa victime et son véhicule, devint la prêtresse de son culte. Le mythe affirme qu'Artémis a transporté Iphigénie vers la terre lointaine de Tauride, où elle devint sacrificatrice, offrant les étrangers en sacrifice sur l'autel de la déesse, jusqu'à ce qu'Oreste arrive, poursuivi par les Furies pour avoir commis un matricide. Grâce à la ruse d'Iphigénie, le frère et la soeur pourront tromper la reine barbare et revenir en Grèce, emportant avec eux le xoanon, le statuette sacrée en bois représentant la déesse.

Iphigénie vécut le reste de sa vie en Attique, comme prêtresse d'Artémis Brauronia. Quand elle mourut, elle fut honorée comme héroïne, et la coutume fut instituée de lui consacrer les vêtements des femmes mortes en couches.

 

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© MINISTÈRE GREC DE LA CULTURE - ICOM - COMITÉ NATIONAL HELLENIQUE
De Medée à Sapho - Femmes rebelles de la Grèce Antique
Athènes, Musée Archéologique National - 20 Mars - 30 Juin 1995