ALCESTE
l'amour plus fort que la mort
Selon Homère, Alceste était la plus belle des filles de
Pélias, roi d'Iolcos. La tradition archaïque la connaît
comme une épouse d'une grande beauté : afin de l'obtenir,
Admète, roi de Phérae, dut accomplir une tâche
difficile.
Par son propre sacrifice, qui formait le sujet de la tragédie Alceste de
Phrynichos, ainsi que de l'oeuvre du même nom par Euripide, Alceste
devint l'une des héroïnes les plus célèbres de la
mythologie grecque.
Apollon avait promis à son ami Admète qu'il
échapperait à la mort si quelqu'un d'autre acceptait de mourir
à sa place. Quand vint le moment critique, cependant, il ne se trouva
personne pour accepter l'échange. Même le père et la
mère du roi, malgré leur grand âge, refusèrent
d'échanger leur vie pour celle de leur fils. Seule sa jeune femme
accepta sans hésiter d'offrir à son époux le plus grand
cadeau possible, qui pour elle signifiait la fin.
Alceste est une femme heureuse, jeune belle, mère de deux jeunes
enfants, fille et épouse de rois, qui possède puissance et
richesse, et pourrait certainement, après la mort d'Admète,
trouver le meilleur parti possible pour l'épouser et continuer de vivre
la même vie tranquille et heureuse. Néanmoins, sans être
contrainte par la moindre nécessité, par le malheur ou par la
douleur, elle décide de donner sa vie pour sauver celle de son
époux. C'est que, elle le dit elle-même au moment de son
départ :
"[Je] je pourrai[s] continuer à vivre, déchirée de toi"
Euripide, Alceste, 287
Sereine et digne, comme il sied aux héros, Alceste est prête
à partir pour un voyage sans retour. Le seul moment où elle
cède et permet à sa douleur et à ses larmes de se
montrer est lorsqu'elle fait ses adieux au lit conjugal :
"Ô couche, sur laquelle je perdis ma ceinture de vierge
Pour cet homme, pour qui je meurs aujourd'hui,
Adieu : je ne te hais point. C'est moi que tu as tuée,
Moi seule : c’est pour toi, c’est pour mon époux que je meurs ;
Je n’ai pas voulu vous trahir.
Euripide, Alceste, 177-181
Par le sacrifice qu'elle fait d'elle-même, Alceste devient la preuve
vivante du pouvoir de l'amour.
Elle s’éleva si haut [au-dessus des parents d’Admète], par une
affection dont l’amour était le principe, que dès lors, ils
apparaissaient, eux, n’être à l’égard de leur fils que des
étrangers, et ne lui être liés que par le nom.
Voilà l’acte qu’elle a accompli. Et cet acte a paru tellement beau, non
pas aux hommes seulement, mais aux dieux, qu’[ils]l’ont fait remonter [de
l’Hadès], dans l’élan de leur admiration pour son acte.
Platon, Le banquet, 179c
(Trad. Lon Robin)
La mort est contrainte à la défaite par la femme dont l'amour
est plus fort que les lois de la nature et les lois des mortels. La meilleure de
toutes les femmes, Alceste devient un symbole éternel d'amour sans
calcul, de l’amour qui ne connaît pas de limites.