Chapitre 6

La mythologie de la musique

Apollon, le dieu de la musique
et le musicien des dieux

Apollon, fils de Zeus et de Létô, frère jumeau d’Artémis, était le dieu de la musique, de l’harmonie, de la lumière, du verbe et de l’ordre. Les autres dieux le respectaient mais le craignaient aussi.

Mais lorsqu'il montait sur l’Olympe, ils ne manquaient jamais une occasion de courir vers lui pour profiter de sa musique, une musique qui combattait la violence et le désordre, où qu’ils soient, y compris sur l’Olympe. Au son de la cithare, le redoutable Arès, le dieu de la guerre, s’apaisait, l’aigle de Zeus s’endormait sur le sceptre du dieu, son foudre redoutable se réduisait en flamme. Aphrodite, Artémis, Hébé et Harmonie se mettaient à danser avec les Grâces et les Heures, tandis que les compagnes du dieu, les Muses chantaient les grâces des immortels et les tourments des mortels.

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Apollon joue de la cithare entre sa mère, Létô, et sa sœur, Artémis. Une biche et une panthère, assagies, écoutent la musique divine. Vase à figures rouges. Fin du VIe siècle av. J.-C. - Londres, British Museum.

Les Muses, le chœur des dieux

Les Muses, les neuf sœurs jumelles, filles de Zeus et de Mnémosyne, symbolisent avec Apollon la création artistique dans le domaine des dieux. Protectrices de la poésie, de la musique, de la danse, de l’histoire, de la comédie, de la tragédie et des sciences, elles prodiguaient généreusement leurs dons à tous ceux qui les honoraient et portaient secours à tous ceux qui les invoquaient. En tant que filles de Mnémosyné (la personnification de la Mémoire), elles étaient les déesses de la tradition orale et les poètes épiques les invoquaient pour chanter les histoires glorieuses du passé. Mais malheur à ceux qui avaient l’audace de les provoquer ! Leur vengeance était redoutable. C’est ainsi qu’elles rendirent aveugle un chanteur de Thrace, Thamyris, qui s’était vanté de chanter mieux qu’elles, après lui avoir confisqué tous les dons qu’elles lui avaient offerts, c’est-à-dire le talent de chanter et de jouer de la cithare. Elles furent tout aussi cruelles avec les Sirènes qui les avaient provoquées en leur proposant un concours de chant : les Muses gagnèrent le concours et, pour punir leurs concurrentes, elles les dépossédèrent de leurs ailes ; les Sirènes tombèrent alors dans la mer et se noyèrent.

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Une Muse, assise sur un rocher, sur l’Hélicon, joue de la cithare. A ses pieds, on distingue un rossignol. Lécythe blanc. Vers 440 av. J.-C. - Munich,
Staatliche Antikensammlungen.

Athéna et l’invention de l’aulos

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Un beau jour, Athéna Ergané (la protectrice du travail manuel et de l’artisanat), la déesse des arts et de la technologie, inventa l’aulos. Elle prit un roseau, y perça quelques trous, et commença à jouer de la musique. Un silène, Marsyas, entendit sa musique et partit la rejoindre. Mais en voyant la déesse, les joues gonflées, en train de souffler dans le roseau, il éclata de rire. Athéna s’interrompit et lui demanda pourquoi il riait. Marsyas lui dit que la flûte la défigurait tellement qu’elle était très comique ! La coquette déesse jeta aussitôt son aulos qui atterrit dans les mains de Marsyas.

Selon une autre version de la légende, Athéna constata toute seule à quel point l’aulos la défigurait, en apercevant son image dans les eaux d’un lac : elle jeta au loin l’instrument que, pour son malheur, Marsyas ramassa. Mais la suite est une autre histoire...

Athéna, protectrice des œuvres humaines aussi bien guerrières que pacifiques, est ici figurée au moment où elle vient de poser un instant son bouclier pour prendre en main la plume. Amphore panathénaïque à figures rouges. Vers 480 av. J.-C. - Munich, Staatliche Antikensammlungen.

Hermès, le bébé turbulent qui a inventé la lyre

Hermès, fils de Zeus et de la nymphe Maia, fut dès sa naissance un enfant prodige. Intelligent, malin, espiègle, le petit dieu s’enfuit de son berceau quelques heures à peine après sa naissance et sortit de la grotte où habitait sa mère, pour partir à la découverte du monde ! La première rencontre qu’il fit était une tortue. Sans la moindre pitié pour la pauvre bête, Hermès la tua, vida sa carapace et en recouvrit la cavité à l’aide d’une peau. Puis, il fixa deux montants sur la carapace, plaça un morceau de bois entre les deux, et y attacha sept cordes faites de boyaux d’agneau. Le jouet était prêt et le petit dieu tout heureux se mit à jouer et à chanter. Mais il se lassa vite et s’empressa d’inventer une nouvelle espièglerie : voler les vaches d’Apollon, son frère aîné, qui paissaient dans les montagnes de Piérie. Il vola 50 bêtes et les emmena en lieu sûr, en les obligeant à marcher à reculons pour brouiller les traces et berner Apollon. Puis il réintégra sa grotte et son berceau ! Apollon ne tarda pas à s’apercevoir du larcin.

Il commença à chercher et à interroger les gens : il rencontra un vieillard qui lui dit avoir vu son troupeau mené par un bébé et, à reculons par dessus le marché, les queues devant et les têtes derrière ! Le dieu comprit aussitôt que le terrible bébé n’était autre que son frère et courut jusqu'à la grotte de Maia. Mais le petit voleur, qui avait repris l’apparence d’un bébé innocent dans son berceau, nia tout en bloc. Apollon l’attrapa et l’emmena auprès de leur père, Zeus. Celui-ci fut d’abord amusé par l’espièglerie du jeune dieu et plutôt fier de ses inventions, mais il finit par lui ordonner de restituer l’objet de son larcin. Hermès conduisit Apollon jusqu'à sa cachette et lui rendit ses bêtes. Mais, voyant que le dieu ne lui avait toujours pas pardonné, il inventa un autre subterfuge. Sachant combien Apollon était ému par la musique, il sortit sa lyre et se mit à jouer. Impressionné, Apollon oublia sa colère et promit à son frère les honneurs et la gloire parmi les immortels, en échange de sa lyre. Hermès, a qui ce marche conviendra bien, céda sa lyre au dieu de la musique.

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Hermès aimait beaucoup la musique, la fête et la bonne compagnie. Ici, nous le voyons en compagnie du satyre Oreimachos. Le dieu tient à la main une oenochoé et une coupe à vin et le satyre joue du barbiton. La musique mélodieuse a charmé la biche qui assiste à la scène. Vase à figures rouges. Date vers 500- 400 av. J.-C. - Berlin, Antikenmuseum, Staatliche Museen Preubischer Kulturbesitz.

Pan et Syrinx : un amour malheureux

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Pan, le dieu jovial des montagnes d’Arcadie, connut bien des amours malheureuses dans sa vie. Ici, nous le voyons qui tente de serrer Aphrodite dans ses bras, mais celle-ci le repousse et le menace d’un coup de sandale. Un petit amour se hâte de la secourir et empoigne Pan par la corne. Groupe Aphrodite et Pan. Vers 100 av. J.-C. - Athènes, Musée Archéologique National.

Affligé de pieds de bouc, d’oreilles pointues et de cornes, couvert de poils, d’une laideur horrifiante, mais toujours joyeux et prêt à faire la fête, le dieu Pan, compagnon de Dionysos, fut malheureux depuis sa plus tendre enfance. Dès qu’elle le vit, sa mère, une jeune nymphe, fut horrifiée par sa difformité et l’abandonna. Il fut recueilli par son père, Hermès, qui l’emmena avec lui sur l’Olympe. Les dieux l’y accueillirent et l’aimèrent en dépit de sa laideur. Mais il n’eut pas la même chance avec les femmes : chaque nymphe qui l’apercevait s’enfuyait aussitôt, épouvantée. Il en alla de même avec la très belle Syrinx, fille du fleuve Ladon. Pourchassée par Pan, elle courait pour lui échapper, mais le dieu se rapprochait dangereusement. Un peu avant qu’il ne l’attrape, Syrinx eut le temps d’appeler au secours Zeus et le dieu la transforma en roseau. Après avoir versé des larmes amères sur son amour malheureux, Pan coupa des roseaux et fabriqua avec la tige de sa bien aimée transformée un instrument de musique au son suave, la syrinx polycalame.

Orphée et la magie de la musique

Orphée, fils de la muse Calliopé et du dieu- fleuve Oeagre, était un musicien, un poète et un devin renommé.

Sans être lui-même un guerrier, il prit part à l’expédition des Argonautes. Avec sa lyre pour toute arme, il sauva ses compagnons de divers dangers : par sa musique, il calmait la colère des vagues, donnait la cadence aux rameurs de l’Argos, faisait cesser les bagarres entre héros ; il leur permit de passer les terribles écueils qu’étaient les Symplégades, il endormit le dragon qui gardait la Toison d’Or et enfin aida les Argonautes à échapper aux Sirènes.

Le charme de sa musique était tel que, lorsqu’il jouait, les oiseaux volaient en bande au-dessus de sa tête, charmés ; les bêtes sauvages s’apprivoisaient ; même les poissons sortaient de l’eau pour l’écouter ! Grâce à sa musique, il réussit à apaiser le sauvage Cerbère et même à émouvoir l’impitoyable dieu des Enfers, Hadès, lorsqu’il osa descendre dans le royaume des morts pour lui demander de laisser Eurydice, la femme qu’il aimait, remonter dans le monde d’en haut. Hadès se laissa fléchir et accepta de laisser partir Eurydice. Mais à condition qu’Orphée ne la regarde pas avant qu’ils ne soient revenus sous la lumière du soleil. Impatient, Orphée ne tint pas compte de ces recommandations et c’est ainsi que sa bien aimée retourna à jamais dans le monde des ombres.

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Orphée, assis sur un rocher, joue de la lyre. Autour de lui, quelques Thraces, hommes rustres et farouches, en entendant les divines mélodies, immobiles, comme hypnotisés. Vase à figures rouges. Vers 450 av. J.-C. - Berlin, Antikenmuseum, Staatliche Museen Preubischer Kulturbesitz.

Concours musicaux entre dieux

Les dieux musiciens se défiaient souvent les uns les autres dans des concours de virtuosité qui finissaient parfois par coûter la vie au perdant. Nous avons déjà vu avec quelle cruauté les Muses avaient châtié leurs adversaires, les Sirènes, qui avaient eu l’audace de concourir avec elles.

C’est avec une même cruauté qu’Apollon punit Marsyas lorsque celui-ci se vanta d’être meilleur musicien que lui. Le dieu accepta de concourir avec lui, il vainquit l’arrogant silène et en guise de punition l’écorcha vif !

C’est de bien meilleure grâce que ce même dieu accepta de relever le défi que lui proposait Pan. Les deux dieux concoururent en présence de juges. Apollon jouait de la lyre, Pan de la syrinx et les juges déclarèrent Apollon vainqueur. En principe, le dieu aurait donc dû être content du résultat, mais il était furieux parce que le roi Midas avait voté pour Pan ! C’est pourquoi il le punit d’avoir eu l’audace de douter de lui et le gratifia de magnifiques oreilles d’âne !

Marsyas joue de la cithare, assis sous un palmier, dans le sanctuaire d’Apollon. Athéna est debout devant lui. Légèrement sur la droite, Apollon lui-même et Artémis semblent suivre le récital avec intérêt. Vase à figures rouges. Vers 410 av. J.-C. - Ruvo, Museo Jatta.

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